Historique de la légalisation du jeu au Canada
Le Canada a connu une évolution unique de la réglementation du jeu : l'interdiction fédérale de la fin du XIXe siècle a progressivement cédé la place à un modèle où les provinces « dirigent » l'industrie - des loteries et des casinos terrestres aux jeux en ligne. Les amendements de 1969 et 1985 au Code pénal, ainsi que la décision de la Cour suprême dans l'affaire R. v. Furtney (1991), qui a confirmé la constitutionnalité de l'administration provinciale, ont marqué un tournant. Au XXIe siècle, le vecteur s'est déplacé vers le canal en ligne : un événement marquant a été l'ouverture du marché réglementé d'iGaming en Ontario le 4 avril 2022.
Début : interdiction générale et exceptions rares (1892-1960)
Le premier Code criminel du Canada (1892/entré en vigueur en 1893) consacrait une interdiction générale des jeux de hasard, poursuivant la ligne des actes post-fédératifs ; plus tard dans le code est apparue la formule clé « lottery scheme » (1906), par laquelle les exceptions ont ensuite été construites. À l'époque, seules des formes étroites comme le tirage au sort étaient admises, mais l'approche générale restait prohibitive.
Le tournant de 1969 : les loteries d'Etat
Les modifications apportées au Code criminel en 1969 ont pour la première fois légalisé les loteries d'État - pour Ottawa et les provinces. C'est devenu la « porte d'entrée » à la légalisation contrôlée : le gouvernement pouvait collecter des revenus et gérer les risques par le biais de structures publiques. C'est de là que viennent les sociétés de loterie provinciales (BCLC, Loto-Québec, OLG, etc.).
Réforme de 1985 : les provinces reçoivent la direction
En 1985, le Parlement a redéfini les pouvoirs : les provinces ont obtenu le droit exclusif de « mettre en œuvre et de gérer » les loteries et les régimes connexes sur leur territoire (art. 207 du Code pénal), et les fédéraux ont effectivement « quitté » le rôle d'exploitation. Cela a légalement ancré le modèle moderne : Ottawa définit un « cadre » par le droit pénal, et les provinces créent des sociétés et réglementent les marchés.
Confirmation judiciaire : R. v. Furtney (1991)
La Cour suprême du Canada, dans R. v. Furtney (1991), a confirmé la constitutionnalité du régime : l'interdiction et les exceptions à celui-ci relèvent du droit pénal fédéral, mais la « gestion » effective des loteries et des casinos dans le cadre des exceptions relève de la compétence des provinces. La décision a levé la principale incertitude juridique autour des casinos provinciaux et des jeux caritatifs.
Des loteries au casino : 1989-1990
Après le renforcement du cadre juridique, les provinces ont commencé à ouvrir un casino. Historiquement, il est considéré comme l'un des premiers casinos de Winnipeg (1989) ; en 1993, le plus grand Casino de Montréal du pays, géré par Loto-Québec, ouvre ses portes. Les sociétés provinciales ont commencé à intégrer verticalement les loteries, les VLT/créneaux horaires et les tables, canalisant les profits dans les budgets.
Rôle particulier des peuples autochtones : Kahnawà : ke
Parallèlement, des juridictions autochtones se sont formées. Kahnawà : ke Gaming Commission est créée le 10 juin 1996 sous le régime de Kahnawa : ke Gaming Law ; depuis le 8 juillet 1999, il concède des licences continues pour les jeux interactifs et est devenu l'un des régulateurs les plus connus, en particulier dans le segment en ligne. Cela souligne la nature à plusieurs niveaux de la réglementation canadienne.
L'ère en ligne : des sites provinciaux au marché ouvert de l'Ontario
Jusqu'en 2022, les jeux en ligne passaient principalement par des sites provinciaux « propres » : par exemple, avant le lancement du marché en Ontario, le seul site réglementé était OLG. ca sous la supervision d'AGCO. Le 4 avril 2022, l'Ontario a lancé le premier modèle au Canada avec des exploitants privés sous iGaming Ontario (iGO) et AGCO, en ouvrant un marché autorisé et en introduisant des exigences de gemblais, de publicité, de KYC/AML et d'aptitude technique responsables.
Pourquoi exactement : répartition des pouvoirs
En vertu de la Constitution, le droit pénal est un domaine fédéral, mais le modèle d'exception du Code criminel a permis aux provinces de devenir des « opérateurs/gestionnaires » dans la pratique. Dans Furtney, la Cour suprême a indiqué qu'il ne s'agissait pas d'une « délégation de droit criminel », mais d'une conception acceptable : Ottawa définit l'interdiction et les exceptions, les provinces la mise en œuvre dans les exceptions.
Jalons et temporisation
1892/1893 - Le Code pénal a été adopté et est entré en vigueur avec des interdictions générales sur les jeux d'argent.
1906 - Le terme « système de loterie », qui formalise les exceptions, est introduit dans le code.
1969 - Les modifications autorisent les loteries d'État (fédérales et provinciales).
1985 - Les provinces obtiennent le droit exclusif de « diriger et gérer » les loteries/casinos (art. 207).
1989-1993 - Les premiers grands casinos : Winnipeg (1989), Casino de Montréal (1993).
1991 - R. v. Furtney, la Cour suprême confirme le modèle des pouvoirs.
1996/1999 - Kahnawá : ke crée une commission et introduit un règlement sur les jeux en ligne.
2022 - L'Ontario ouvre le premier marché au Canada avec des opérateurs privés en ligne.
Aujourd'hui et au-delà : tendances réglementaires
Le modèle canadien actuel demeure centré sur les provinces : chaque province/territoire définit un produit (loteries, casinos, VLT, en ligne) et des normes de responsabilité, et les fédéraux maintiennent un contrôle « cadre » du droit pénal. Parallèlement, la surveillance du secteur en ligne (publicité, normes RG, certification des plates-formes) est renforcée et les juridictions autochtones continuent de jouer un rôle important dans l'écosystème des licences à distance. Le lancement de l'Ontario a alimenté le débat sur l'adaptation possible des approches dans les autres provinces, même si chacune évaluera les risques, les effets fiscaux et les exigences techniques à sa façon.
La légalisation du jeu au Canada n'est pas un seul « oui/non », mais un processus de longue date pour équilibrer l'interdiction pénale et la gestion pratique au niveau provincial. Les amendements de 1969 et 1985 ont fixé l'architecture, Furtney l'a confirmée, les années 1990 ont apporté les casinos terrestres, et 2022 - une nouvelle ère du marché en ligne réglementé. Ce modèle s'adapte avec souplesse à la technologie et aux attentes du public, tout en gardant l'accent sur la responsabilité et l'intérêt public.